Faire des prévisions avec les grilles quantiles

Les grilles quantiles représentent une amélioration significative par comparaison avec les prévisions classiques ou quantiles lorsqu'il s'agit de prévisions de stock. Cependant, les prévisions probabilistes surpassent largement les grilles quantiles. Pour en savoir plus, consultez nos pages les plus récentes de la section Technologie.

Les grilles quantiles constituent une amélioration radicale par rapport aux méthodes classiques de prévision dès lors qu'on s'intéresse aux stocks. Elles sont même supérieures aux prévisions quantiles, car elles fournissent plus d'informations sur le futur. Les méthodes de prévision traditionnelles ne sont pas satisfaisantes, en particulier lorsqu'elles sont appliquées au secteur du commerce. La raison en est simple : le futur est incertain. Les prévisions classiques tentent de prédire la demande future avec une unique valeur exacte, et bien sûr, elles échouent... Il est illusoire de croire qu'en améliorant les prévisions classiques il sera possible d'obtenir une valeur "exacte" qui corresponde à la demande future. Les grilles quantiles adoptent un point de vue complètement différent sur cette problématique.

Grâce aux grilles quantiles, Lokad prédit non pas une valeur de la demande future pour un produit donné, mais l'entière distribution des probabilités, c'est-à-dire la probabilité que la demande soit égale à zéro, une, deux unités, etc. Cette information est beaucoup plus riche et peut être exploitée de façon bien plus avantageuse que les prévisions classiques.


Introduction destinée aux non-statisticiens


En lisant ces lignes, si vous n'êtes pas statisticien, vous devez vous demander si votre entreprise a une quelconque chance d'arriver à faire quelque chose de sensé avec ces fameuses « grilles quantiles ». En effet, cela ressemble plus au titre d'une thèse en statistique moderne qu'à un moyen pratique d'établir des prévisions. Si ce terme est trop intimidant, remplacez-le simplement par « prévisions réellement utilisables ». Sachez que la plupart des entreprises qui utilisent Lokad n'ont aucune connaissance en statistiques. Le filtre anti-spam de votre boîte aux lettres électronique repose également sur des notions avancées de statistique, et pourtant, nul besoin d'être Docteur en statistiques pour utiliser une boîte mail.

Lokad fait plus ou moins la même chose pour le commerce : nous exploitons le Machine Learning pour rendre votre entreprise plus rentable, et la technologie que nous utilisons est suffisamment avancée pour que vous n'ayez presque plus besoin de vous en préoccuper.

Nous décrivons ci-dessous ce qui se passe en coulisses à Lokad, mais vous pouvez être certain que notre application est à votre portée, même si vous ne comprenez pas totalement comment fonctionne notre moteur de prévisions — tout comme vous utilisez votre filtre anti-spam sans rien connaître des inférences bayésiennes.

Repenser les prévisions pour le commerce

Beaucoup de vendeurs se vantent d'utiliser des méthodes de prévision soit-disant "avancées", telles que ARIMA, Box-Jenkins ou Holt-Winters, qui ont, en fait, presque un demi-siècle et ont toutes été conçues à une époque où les ordinateurs professionnels les plus performants étaient moins puissants que la plupart des réfrigérateurs modernes. Les inventeurs de ces méthodes étaient exceptionnellement intelligents, mais devaient composer avec les ressources informatiques de leur époque et donc préféraient les modèles qui nécessitaient peu de calculs. Aujourd'hui, il est possible de mettre à contribution l'immense puissance informatique disponible pour surmonter les difficultés que posent les prévisions, et ce à un coût relativement limité.
Gardez à l'esprit que 1000 heures de puissance de calcul coûtent aujourd'hui moins de 50 dollars lorsque vous faites appel à une plateforme de cloud computing. De façon évidente, cela ouvre de nouvelles perspectives pour les prévisions et c'est exactement cela que Lokad cherche à explorer. Les grilles quantiles représentent la troisième génération de la technologie de prévisions de Lokad, mais revenons quelques années en arrière pour mieux comprendre notre démarche. Nous avons démarré avec des prévisions classiques en 2008 ; il s'agissait de la première version de notre technologie et, malgré d'énormes efforts de recherche et développement fournis pendant trois ans, l'approche classique s'est révélée être une impasse. Aucun de nos clients n'était réellement satisfait des résultats des prévisions classiques. Plus nos clients partageaient avec nous leurs expérience avec d'autres solutions de prévisions, plus nous découvrions qu'aucune entreprise n'était satisfaite des technologies disponibles dans ce domaine. Le problème n'était pas spécifique à Lokad ; nous avons réalisé que le secteur des prévisions dans son ensemble ne fonctionnait pas correctement et nous avons décidé d'en tirer les conséquences.

En 2012, Lokad a mis à disposition la deuxième version de sa technologie de prévisions : les prévisions quantiles. Pour résumer, les prévisions quantiles s'attaquent au principal problème des prévisions classiques qui est qu'elles ne s'intéressent tout simplement à la bonne problématique.

En effet, le défi que doivent relever les entreprises est d'éviter deux situations extrêmes : un pic de demande imprévu qui peut causer une rupture de stock, et une demande trop faible qui entraîne des problèmes de stock mort. Ce qu'il se passe entre ces deux extrêmes, lorsque la demande est plus ou moins au niveau "attendu", n'a en fait que peu d'importance pour l'activité d'une entreprise.

Et pourtant, les prévisions classiques - prévisions moyennes ou médianes - ignorent totalement ces cas extrêmes et se concentrent entièrement sur le cas moyen. Il n'est donc pas surprenant que les prévisions classiques ne réussissent pas à empêcher correctement les ruptures de stock ou le stock mort. Les prévisions quantiles,elles, relèvent le défi en se concentrant directement sur les scénarios utiles — éviter les ruptures de stock par exemple — et s'efforcent de fournir des réponses exactes aux problèmes posés. Et soudainement à partir de 2012, de plus en plus de nos clients étaient satisfaits. Pour la première fois de l'histoire de Lokad, plus de 3 ans après le lancement de l'entreprise, nous avions un outil qui fonctionnait vraiment.

En 2015, Lokad a mis en production la troisième version de sa technologie de prévisions : les grilles quantiles. Les prévisions quantiles représentaient déjà un progrès radical par rapport aux prévisions classiques, mais elles avaient leurs points faibles. Au fur et à mesure des déploiements et mises en œuvre que nous avons effectués chez nos clients, nous avons réalisé que produire des prévisions pour un seul scénario est utile, mais il est possible d'aller encore plus loin. Pourquoi seulement un scénario ? Pourquoi pas un deuxième ou un troisième ? Manipuler plusieurs scénarios manuellement, sans automatisation, s'est avéré fastidieux, et nous avons réalisé qu'il faudrait établir des prévisions sur tous les scénarios en une seule fois. D'un point de vue informatique, c'était bien plus coûteux : pour chaque produit, il faut calculer la probabilité de (presque) chaque niveau de demande possible. Cependant, même si la quantité de calculs semble stupéfiante, le prix des ressources informatiques est en chute libre depuis plusieurs années. Et ce qui aurait pu être jugé trop coûteux il y a 5 ans, est maintenant très abordable. En 2015, Lokad a mis en production la troisième version de sa technologie de prévisions : les grilles quantiles. Bien que gourmandes en calculs informatiques, les grilles quantiles sont maintenant abordables grâce à la chute libre du coût des ressources de cloud computing.

Couvrir la totalité de la distribution de probabilités de la demande

La demande future est incertaine et il est un peu naïf de vouloir ne la représenter que par une seule valeur car, quelle que soit la qualité de cette estimation, elle ne peut que rester très partielle. Bien sûr, il serait agréable d'avoir une formule « magique » capable de prédire le niveau exact de la demande à venir, mais les chances que cela se produise sont faibles... En outre, lorsque l'on essaye d'exploiter des prévisions erronées, il est très tentant d'essayer de les « corriger ». Malheureusement, le fonctionnement des prévisions statistiques est assez largement contre-intuitif et, en réalité, il n'y a généralement aucune correction à apporter : la valeur prévue est effectivement l'une des valeurs que pourrait prendre le niveau de la demande dans le futur.
Il est parfois possible de paramétrer le système afin que ce dernier propose des valeurs ayant une probabilité plus élevée d'être égales à la demande future, mais on ne peut guère aller plus loin. Votre entreprise se retrouve alors avec des valeurs légèrement plus probables pour la demande future, ce qui n'a pas pour autant les résultats espérés sur votre activité.

L'approche des grilles quantiles est très différente : pour chaque produit, Lokad calcule la probabilité respective de chaque niveau de la demande future. Au lieu de continuer à faire croire qu'il est possible de connaître véritablement la demande future, les grilles quantiles expriment directement les probabilités associées aux différents futurs possibles.

Prenons par exemple un produit qui ne se vend pas très souvent, avec un délai de réapprovisionnement de 2 semaines. La distribution de la demande sur les 2 semaines à venir (l'horizon des prévisions doit généralement être égal au délai de réapprovisionnement) peut être représentée ainsi :

DemandeProbabilité
0 unité 55 %
1 unité 20 %
2 unités 14 %
3 unités 7 %
4 unités 3 %
5 unités 0 % (arrondi)

Il peut paraître compliqué d'envisager le futur en termes de probabilités, mais c'est en fait ce que les cadres dirigeants font déjà au quotidien, certes de façon moins formelle : ils évaluent la probabilité qu'ont certains événements de se produire et préparent leur entreprise à faire face aux scénarios les plus probables. Du point de vue d'un moteur de prévisions, comme il est impossible de savoir quels sont les scénarios les "plus probables", la solution logique, quoique brutale, est de traiter tous les scénarios possibles. Cependant, en faisant l'hypothèse qu'une entreprise a un millier de produits pour lesquels des prévisions doivent être établies (sachant que certains de nos clients ont des millions de SKUs à traiter) et que Lokad calcule les probabilités associées avec 100 scénarios pour chaque produits, les grilles quantiles résultantes seraient une immense liste de 100 000 entrées, très peu pratique à exploiter. Nous abordons ce point dans la section ci-dessous.

Prioriser les décisions supply chain


Pour chaque décision d'achat, on peut poser un calcul simple, avec un "résultat" qui dépend de la demande future vs la décision d'achat actuelle. Puis, un score peut être associé à chaque décision, sur la base des probabilités respectives de chaque possible niveau de la demande future.


Priorité des achats dans l'optimisation des stocks
Les prévisions de la demande sont communément utilisées pour faciliter certaines décisions supply chain — passer une commande ou lancer un ordre de production par exemple. Une fois que l'on a toutes les probabilités, associées à tous les scénarios qui en résultent, on peut alors établir une liste priorisée complète de toutes les décisions d'achat. En effet, pour chaque décision d'achat, un calcul simple indiquant les conséquences financières associées peut être fait : si la demande est de D unités et que l'on achète P unités, alors le résultat financier sera X. Il va sans dire que Lokad est là pour vous aider dans ce calcul, qui se résume, pour la plupart des entreprises, à la marge brute moins le coût du stock, moins le coût d'une rupture de stock. Ainsi, un fois la formule du calcul établie, les conséquences de chaque décision logistique — comme « acheter 1 unité du produit Z » — peuvent être mesurées et comparées aux probabilités de chaque scénario possible. Ce faisant, le « score » de chaque décision possible est calculé.

Une fois le score de chaque décision calculé, il est possible de classer ces décisions en mettant les plus rentables en début de liste. Nous appelons cette liste la liste priorisée d'achats. Chaque produit y est présent sur plusieurs lignes. En effet, même si acheter 1 unité du produit Z est la meilleure décision d'achat (i.e. l'achat le plus pressant), il se peut qu'acheter la prochaine unité du produit Z soit au 20e rang des achats les plus pressants, avec beaucoup d'autres unités d'autres produits à acheter dans l'intervalle.

Priorité des achats dans l'optimisation des stocks
La liste priorisée d'achats répond à une question très simple : si l'entreprise dispose d'un euro de plus à dépenser pour son stock, à quoi cet euro doit-il servir en premier ? Bien évidemment, il doit aller au produit qui donnera à votre entreprise le meilleur retour sur investissement. Puis, une fois ce produit acheté, la question doit être posée à nouveau. Cependant, une fois cette unité de produit acquise, le produit suivant sur la liste est sûrement différent du premier, puisqu'il est souvent désavantageux de stocker un grand nombre d'unités du même produit. En effet, plus votre stock est important, moins il tourne, et donc plus forte est la probabilité de se retrouver avec du stock mort. Ces difficultés sont naturellement prises en compte dans la formule de calcul des conséquences financières, et donc dans la liste des priorités qui en résulte.

Mieux que l'ajustement du taux de service

Trouver les taux de service « optimaux » — c'est-à-dire de la probabilité souhaitée de ne pas être en rupture de stock - est un exercice très difficile. C'est une question complexe, car les taux de service ne sont qu'indirectement reliés à la performance financière d'une entreprise. Ainsi, il peut être très coûteux d'augmenter de 1 % le taux de service de certains produits, et donc, si des ressources sont disponibles elles doivent plutôt être allouées à d'autres produits, pour lesquels le même niveau d'investissement augmenterait non pas de 1%, mais de 10 % le taux de service.

En utilisant les grilles quantiles pour obtenir une liste priorisée d'achats, plus besoin de se soucier des taux de service : ils sont représentés naturellement à travers les priorités elles-mêmes.

Si le taux de service d'un produit à forte marge peut être augmenté à moindre coût, le produit se trouvera naturellement en haut de la liste. À l'inverse, si un produit souffre de ventes très irrégulières, qui rendent extrêmement coûteuse l'augmentation de son taux de service, alors il ne se trouvera en tête de liste que lorsque le niveau stock associé est dangereusement bas et que l'entreprise est quasiment sûre de ne pas avoir à gérer de stock mort malgré des ventes très irrégulières. La liste priorisée résout également le problème des contraintes de trésorerie. Quelle que soit la situation de votre entreprise en matière de trésorerie, cette liste vous offre plusieurs options. Si vous avez peu de trésorerie disponible, vous n'achetez que les produits en haut de la liste et recomposez uniquement les niveaux de stock pour les produits qui doivent impérativement être disponibles. Si vous avez plus de trésorerie, votre entreprise peut augmenter son stock en se concentrant sur les produits les plus rentables tout en gardant sous contrôle les risques liés au stock.

Prendre en compte les contraintes logistiques

Les entreprises doivent souvent faire face à des contraintes de réapprovisionnement telles que les quantités minimales de commande (au niveau SKU, ou bien au niveau de la commande globale), ou bien le regroupement d'unités en grande quantité dans des containers. De telles contraintes peuvent être intégrées naturellement grâce à une liste priorisée d'achats, telle que décrite ci-dessus ; cette dernière ne fournit pas seulement des suggestions d'achat avec un niveau de priorité, mais également des recommandations compatibles avec vos contraintes d'approvisionnement.

La marche à suivre dépend du type de contrainte à prendre en compte. Prenons l'exemple de l'envoi de containers. Lokad peut calculer les volumes cumulés par fournisseur — en faisant l'hypothèse que les achats sont effectués dans l'ordre de la liste et que chaque fournisseur livre indépendamment des autres. À partir de ces volumes cumulés, il suffit de parcourir la liste jusqu'à ce que la capacité du container soit atteinte. De la même façon, s'il existe une contrainte de quantité minimale de commande pour un SKU donné, il est facile de supprimer de la liste toutes les lignes avant que la condition ne soit remplie, et de reporter la quantité minimale directement dans la première ligne une fois la condition remplie.

Priorité des achats dans l'optimisation des stocks
En paramétrant l'achat avec N unités au minimum, la compétitivité du SKU est amoindrie, c'est-à-dire que le SKU apparaît alors dans la liste à un rang inférieur, ce qui est exactement le comportement attendu, puisque les risques associés au stock augmentent avec des quantités de commande minimales. Cette approche apporte notamment une réponse à la problématique à laquelle les prévisions classiques et quantiles se heurtent depuis longtemps : que faire lorsque les quantités à commander sont au-dessus ou en-dessous des contraintes de réapprovisionnement ? S'il faut enlever des unités, quels produits viser en premier ? S'il faut ajouter des unités, quels produits doivent être achetés en plus grandes quantités ? Les anciennes méthodes de prévisions n'apportaient pas de réponses satisfaisantes à ces questions. Avec une liste priorisée d'achats, il suffit de suivre l'ordre de la liste.