Lean Management de la Supply Chain (Lean SCM)

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Estelle Vermorel, février 2020

Abstract graph illustrating the complexity of a supply chain Depuis les années 1990, le concept de "Lean" a été très important, tout d'abord dans le monde de la production, et puis à partir de là dans d'autres domaines comme celui du Management de la Supply Chain (SCM). Mais qu'est-ce que être Lean implique pour une supply chain ? Qu'est-ce qu'implique l'effort continu de réduction des déchets ? Etant donné la complexité et l'aspect multi-dimensionnel du SCM, ainsi que les compromis réalisés à chaque étape afin de faire face aux multiples options liées à un réseau de la supply chain, et ce sans mentionner les fluctuations de la demande ou des délais de production, le Lean SCM semble plus proche de l'utopie inatteignable qu'autre chose. Cependant, cette perspective peut s'avérer déterminante dans la restructuration de la supply chain afin que celle-ci soit plus efficace et compétitive, même si celle-ci possède des différences notables comparée à la au concept de Lean initial du monde de la production (Lean Manufacturing).


Du Lean Manufacturing au Lean Management de la Supply Chain

Sans se lancer dans une description complète de ce qu'est le Lean Manufacturing, voici un rappel rapide des idées essentielles. Le Lean Manufacturing correspond à une méthode destinée à réduire le gaspillage, les coûts et les délais de production. Ce concept s'est inspiré du constructeur automobile japonais Toyota et s'est popularisé sous le terme "Lean" dans les années 1990. Il implique en particulier de réduire trois types de gaspillage, en japonais "muda", "mura", et "muri", ce qui correspond 1) aux processus et activités qui n'ajoutent aucune valeur (comme surproduire ou déménager des produits inutilement), 2) aux irrégularités (comme les emplois du temps irréguliers ou les périodes de creux suivies de périodes de travail intensif), et 3) aux surcharges (comme celle des employés devant soulever des objets trop lourds ou étant mal équipés, ou les équipes ou machines utilisées au-delà des limites du raisonnable). Une extension de l'approche du Lean Manufacturing implique également la création de flux fluides dans la production et la réduction de blocages.

Plus que sur des outils, le Lean Manufacturing s'appuie sur une approche culturelle et managériale, avec une stratégie, des procédures, une standardisation et une simplification qui sont pensées et appliqués par un leadership dont l'objectif est de continuellement s'améliorer, tout en gardant à l'esprit l'importance du respect des personnes. De cette façon, une grande importance est accordée aux relations à long terme qui doivent être maintenues avec les employées, à la communication de la philosophie Lean aux employés, et au lien essentiel entre les anciens et les nouveaux venus ("Senpai" et "Kohai" en japonais), etc. L'adhérence des employés, et bien entendu leur croyance, en la réduction du gaspillage et l'objectif d'amélioration continue joue un rôle dans le succès de l'initiative d'un Lean Manufacturing, et est probablement la raison pour laquelle cela a été plus difficile à appliquer dans les cultures occidentales. C'est également la raison pour laquelle le Lean Manufacturing a parfois été décrit comme une religion plutôt qu'une science.

Le concept initial a ensuite été transposé dans les supply chains et leur management. Un "Lean" SCM a également pour objectif d'éliminer le gaspillage en appliquant les efforts continus visant à obtenir un meilleur contrôle des stocks et rationaliser toutes les étapes de la supply chain, non seulement celle de la production, mais également celles de l'entreposage, du transport, des retours, etc. C'est là que réside le problème : le SCM est, par nature, extrêmement complexe et implique différentes activités, équipes, différents flux, et des listes interminables d'options à chaque tournant, motivés par la nécessité de s'adapter à une demande potentiellement très fluctuante et difficile à prévoir (pour plus d'informations, voir Management de la Supply Chain (SCM)). Néanmoins, l'objectif d'amélioration permanente et le suivi du gaspillage restent valables, mais ceux-ci doivent être adaptés à cette complexité et ne peuvent donc pas simplement reposer sur des mesures culturelles et managériales.

Eliminer le gaspillage à travers le Lean Management de la Supply Chain : perspective holistique VS perspective locale

Abstract graph illustrating the complexity of a supply chain La complexité du SCM vient du fait que cela englobe tout. En outre, les supply chains regorgent de points de vue, processus, motivations et même enregistrements électroniques contradictoires. Par conséquent, une perspective holistique est essentielle pour toute sorte d'initiative qui aurait pour but d'améliorer la supply chain.

Prenons l'exemple d'une entreprise possédant un réseau de magasins. Les objectifs, et très probablement les motivations financières, de l'équipe d'approvisionnement en charge de l'entrepôt principal ne sont pas toujours alignés avec les objectifs des managers / propriétaires des magasins. L'approvisionnement central peut avoir pour objectif de réduire les stocks, tandis que chaque manager peut simplement vouloir s'assurer que son point de vente particulier soit empli de produits et ne soit pas sujet à des ruptures de stock afin de ne pas risquer de manquer une vente, surtout si les invendus peuvent être renvoyés à l'entrepôt principal et si le magasin en lui-même ne s'occupe pas des coûts liés au surstockage. Les managers des magasins auront même tendance à adopter une logique inverse à celle de l'entrepôt principal, en sachant que si un produit commence à bien se vendre, celui-ci sera rapidement en rupture de stock au niveau de l'entrepôt. Ils commanderont ainsi en large quantités dès que les ventes du produit en question sembleront augmenter. En agissant ainsi, ils risquent non seulement de s'exposer à un surstockage, mais aussi de monopoliser des produits qui auraient pu être vendus plus rapidement dans d'autres magasins, créant alors des ruptures de stock dans d'autres magasins. La situation peut même s'aggraver si des erreurs d'alignement apparaissent dans les enregistrements électroniques au sein du réseau, créant de fausses impressions de ruptures de stock. Quelle réponse devrait alors être apportée à ce problème ? Que signifie "Lean" dans un tel contexte ? Rendre les choses plus simples pour les managers des magasins signifierait s'assurer qu'ils ne soient jamais en rupture de stock et peut facilement renvoyer les produits, mais simplifier les choses au niveau de l'entrepôt pourrait au contraire impliquer de sacrifier la performance de certains magasins au profit d'autres ayant une rotation plus rapide. En même temps, promouvoir seulement les magasins avec une rotation plus rapide aura des conséquences négatives à long terme sur tout le réseau de magasins, puisque la performance de certains magasins pourrait drastiquement baisser.

Les challenges du Lean Manufacturing ont tendance à être plus binaires par nature. La production doit faire face aux lois de la physique, ce qui est assez complexe mais a le mérite d'être binaire : les choses fonctionnent ou ne fonctionnent pas. Il y a bien entendu toujours une question d'équilibre et de réglage précis, mais en règle générale, optimiser l'étape A, puis l'étape B et l'étape C du processus de fabrication a tendance à améliorer la production dans son ensemble. Ceci n'est pas vraiment le cas pour les supply chains. Optimiser l'étape B peut en réalité créer des problèmes pour l'étape C. Le Lean SCM ne correspond pas à une mise en place d'améliorations à échelle locale, mais doit toujours adopter une perspective holistique. L'un des aspects correspond à l'alignement des motivations à chaque fois que cela est possible, ce qui n'est pas toujours le cas puisqu'il est sans aucun doute difficile de transmettre à des individus des motivations qui se rapportent à la performance de l'entreprise ou de la supply chain dans son ensemble. Un autre aspect serait l'alignement des systèmes informatiques (nous y reviendrons plus tard), mais avant tout, il y a la question majeure (mais épineuse) des KPI (indicateurs de performance). Si un Lean SCM a pour objectif de réduire le gaspillage, comment le mesurer ? Mieux, si l'on parvient à le mesurer à travers une perspective holistique, étant donné qu'il est toujours possible de créer des tableaux de bord débordant de KIP spécifiquement adaptés à chaque aspect de chaque tâche ? Mais comment choisir les KPI et systèmes de mesure qui feront sens à tous les niveaux ?

La réponse est en réalité assez simple et très rarement mise en pratique : le dollar/euro ou toute devise qui aurait du sens pour l'entreprise sont la meilleure illustration de la réduction du gaspillage. Cela signifie que chaque action prise au cours de l'initiative de la Lean Supply Chain devra être vue à travers le prisme de son impact financier et du retour sur investissement et les actions devront en conséquence être comparées, pondérées et classées par ordre de priorité. Si garder un produit A dans l'entrepôt principal signifie des coûts de stockage de 100€ + de possibles pertes de vente de 1000€ pour les magasins A et B, mais un bénéfice potentiel de 2000€ pour le magasin C, alors la réponse est plutôt évidente : bouger les produits dans les magasins A et B représente un gaspillage. Bien évidemment, cela n'est qu'un exemple très simplifié. D'une part, les pertes liées aux ventes, ou à d'autres produits que le produit A, et la perte, à terme, de fidélité client doivent aussi être pris en considération, tout comme doivent l'être les coût de livraison qui augmenteraient pour les produits B et C si le camion n'est plus rempli pour les magasins A et B. D'autre part, il faut considérer la possibilité d'une cannibalisation potentielle d'autres produits si le produit A n'est pas en rupture de stock au magasin C, etc. Pour couronner le tout, tout cela est basé sur des ventes potentielles, qui sont par nature incertaines, ce qui doit aussi être pris en compte ...

Cette complexité peut rapidement devenir vertigineuse, mais elle est inévitable étant donné la nature du SCM. C'est également en cela que le Lean SCM diffère du Lean Manufacturing. Le défi ne peut pas être considéré comme étant globalement solvable à travers une approche managériale, principalement orienté vers les relations à la main d'œuvre au sein de la supply chain, tout simplement parce que résoudre le problème de la réduction du gaspillage au sein d'une supply chain dépasse de loin ce que peut réaliser l'esprit humain à lui seul. Le SCM est multi-dimensionnel, et tout comme l'est la voie vers le Lean SCM : cela implique l'informatique, des outils, la gestion du changement pour les équipes, et d'accepter le fait que la simplicité n'est pas toujours ce qu'il y a de préférable.

Quels sont les changements qu'apporte le Lean Management de la Supply Chain ?

Simple vs. simpliste

Abstract photo illustrating conflicting concerns in supply chain On peut s'attendre à ce qu'une initiative de Lean Management de la Supply Chain apporte des changements à divers niveaux et ne soit en aucun cas tâche facile. De tels initiatives nécessiteront un leadership fort, et une réflexion stratégique au plus haut niveau, ce qui est aussi le cas pour le Lean Manufacturing. Cependant, voici une différence particulière avec le Lean Manufacturing : les leaders de tels initiatives doivent accepter et garder à l'esprit le fait que ces modèles simplistes sont souvent défavorables lorsqu'il s'agit de Lean SCM. Viser la simplicité, ce qui est toujours une bonne chose, ne doit pas exclure les complexités irréductibles du monde réel.

Par exemple, il existe différents moyens de se procurer les produits distribués aux consommateurs, et l'approvisionnement est réalisé par différents individus voire différentes équipes pour le même produit : l'un commande régulièrement en petites ou moyennes quantités, l'autre rencontre des opportunités occasionnelles de commandes en gros à des coûts très bas qui déséquilibreront le stock d'un produit donné, et qui cannibalisera divers autres produits. La réponse la plus simple pour réduire un tel déséquilibre serait de réduire le nombre de fournisseurs, les types de contrat, les conditions de prix, etc. En retour, cela impliquerait moins de flexibilité, une impossibilité d'équilibrer fournisseurs étrangers vs. locaux, ou même de faire jouer les délais de production et les conditions de prix les uns contre les autres, ou encore de garder des fournisseurs "de secours", qui pourraient être très bénéfiques à la supply chain dans son ensemble en termes de coûts, de satisfaction client, etc.

Encore une fois, le SCM est une affaire de compromis, et il faut être capable de comparer le pour et le contre de chaque option, et idéalement de pouvoir choisir au dernier moment afin de réduire l'incertitude. Cela peut signifier être capable de se réapprovisionner rapidement lorsque certains produits se vendent mieux que prévu. Cela peut être fait, par exemple, à échelle locale en étant capable d'imprimer des modèles localement sur des matériaux bruts achetés à l'avance à faible coût, plutôt que de commander directement des produits finis qui arriveraient par containers de Chine et impliqueraient nécessairement une planification préalable sur le long terme à cause des délais de production et de transport. Dans de telles situations, le Lean SCM impliquerait d'accepter divers processus et fournisseurs, de les coordonner et de leur fournir les outils nécessaires pour pouvoir évaluer rapidement la performance d'une option face à une autre, et donc d'améliorer la capacité d'approvisionnement pour réagir rapidement à la demande. Chercher sans cesse la simplicité n'est pas une option viable pour le Lean SCM, étant donné que cela signifie souvent de choisir une amélioration locale au détriment de la perspective globale.

Moins d'isolation, plus de coordination

La complexité fait partie à part entière de la supply chain et ne peut être évitée. Cela implique également qu'une importante coordination est nécessaire afin de parvenir à atteindre une supply chain plus légère, plus "lean". Les barrières qui ont été créées au cours du temps entre chaque étape de la supply chain, et donc chaque équipe, doivent être abaissées, ne serait-ce que partiellement, afin de permettre une meilleure compréhension de l'ensemble. C'est là que l'implication des équipes est capital. Afin qu'une initiative Lean SCM digne de ce nom puisse être mise en place, les processus commerciaux, les outils et les systèmes informatiques utilisés doivent être compris, et faire l'objet de discussions et de documentation. Il est impossible de tout rendre transparent au plus haut degré de détails pour chaque membre de l'entreprise, mais il faut autant de compréhension et de transparence que possible, au moins pour plusieurs coordinateurs importants en charge du projet et qui représentent leur département. Ces individus seraient, à leur tour, chargés de relayer l'initiative au reste de leurs équipes. La documentation est capitale pour le succès d'un tel processus. Généralement, la gestion du changement est une étape importante dans le succès d'une initiative Lean, puisque cela implique souvent une certaine restructuration de la main-d'oeuvre.

Une isolation moindre peut avoir des répercussions sur l'information, cela ne signifie pas que tout doit être fusionné en un seul programme, mais simplement que les éléments doivent discuter entre eux de manière plus efficace. Une baisse de l'isolation peut aussi avoir des répercussions sur la façon dont l'entreprise opère financièrement. Les améliorations locales sont les écueils du Lean SCM, et l'optimisation des budgets locaux est l'illustration typique d'un tel écueil. Cela ne signifie pas que les budgets sont voués à totalement disparaître, mais que davantage de flexibilité devrait être permise et que les barrières inutiles devraient être totalement abolies, en particulier lorsqu'il s'agit d'approvisionnement. En effet, des budgets séparés sont plus faciles à gérer, mais l'argent dépensé est toujours celui de l'entreprise, alors pourquoi ne pas le dépenser de façon à ce qu'il bénéficie à l'ensemble, plutôt que de risquer de trop dépenser dans certaines catégories de produits et de réduire le budget dans d'autres catégories où le retour sur investissement aurait pu être meilleur ? Réduire le gaspillage devrait se faire au niveau de tout le catalogue pour une entreprise et non catégorie par catégorie, ou pour une équipe A vs. une équipe B.

Augmenter la productivité des cols blancs

En particulier, l'objectif de l'initiative de Lean SCM devrait être de faire le même genre de bénéfices en termes d'efficacité et de productivité que ceux obtenus en Lean Manufacturing pour la main d'œuvre des cols bleus. Ces bénéfices doivent encore être faits en ce qui concerne la majorité des supply chains impliquant les cols blancs. De plus en plus de gens jouent avec les tableaux Excel ou autres, réalisant des tâches chronophages et répétitives de façon assez peu structurée, sans parler du shadow IT qui accompagne généralement ce genre d'activités. Cela peut provenir du développement d'une bureaucratie interne ayant de plus en plus de processus complexes, diverses étapes de validation (généralement liées à des structures de plans en cascade), ou être l'héritage d'anciens systèmes informatiques. Cela résulte généralement en une main d'œuvre surmenée par des nombres augmentant sans cesse, un manque de transparence (shadow IT, ou fichiers Excel personnalisés à échelle individuelle avec des règles non stipulées en sont le parfait exemple), un manque de structure et de standardisation, et des visions à court terme étant donné qu'il n'y a pas de perspective globale ni de KIP pertinent pour orienter la prise de décisions. Comme toujours, avec les supply chains, plus le marché pousse vers davantage d'options (personnalisation des produits, livraisons à la dernière minute, etc.), plus la charge pour ces cols blancs est lourde, puisque tout cela va à l'encontre d'une flexibilité accrue et d'une capacité à choisir facilement entre les options pour atteindre le meilleur compromis possible.

Alors que la production a fait l'objet de beaucoup d'attention et d'améliorations dans un souci de productivité accrue et de réduction des coûts, le potentiel d'amélioration de la planification, de la tarification et de l'ordonnancement est immense. Une des conséquences du Lean SCM est l'amélioration de l'efficacité du personnel qui a la responsabilité de ces tâches en lui donnant la cadre structurel dont il a besoin pour prendre de meilleures décisions et plus rapidement pour l'ensemble de l'entreprise, et possiblement automatiser une partie de la routine n'ayant pas de valeur ajoutée. Cela signifie souvent de réduire les équipes, ou de réorienter leurs activités vers des tâches à plus grande valeur ne pouvant pas être automatisées.

Cela implique également de se débarrasser des vieilles habitudes et processus anciens. Par exemple, les stocks de régularisation typiques comme les stocks de sécurité, ou les façons de penser trop simplistes comme les commandes min/max sont le genre de gaspillage à réduire en priorité. Tout cela implique évidemment de gérer le changement, et, une fois de plus, doit être mené au niveau le plus haut et répercuté jusqu'aux utilisateur, puisque leur adhérence à ces nouveaux processus est fondamentale pour le succès de toute initiative de cette nature.

Investissements spécifiques

Comme indiqué ci-dessus, le SCM est extrêmement complexe, et toute sorte d'effort pour réduire le gaspillage implique des mesures et évaluations financières de toutes les options possibles. La compréhension des processus commerciaux doivent s'appuyer sur l'analyse de données appropriées afin de s'assurer que la demande, les tendances, et l'impact de stratégies soient mesurés et quantifiés. Les outils ne sont donc pas seulement nécessaires, mais inévitables. C'est aussi là que réside la différence avec le Lean Manufacturing. Si le SCM est la science des compromis, le Lean SCM doit rester profondément ancré dans les faits, et non se baser majoritairement sur la croyance.

Cependant, étant donné que chaque supply chain est unique, avec son propre lot de contraintes, processus, spécificités - et héritages -, viser un Lean SCM implique généralement des investissements spécifiques, puisqu' il n'existe pas d'outils prêts à l'emploi sur le marché. De tels outils doivent avoir la possibilité de s'adapter au lot de contraintes spécifique d'une supply chain donnée, et afin d'évaluer sa performance à partir d'une perspective aussi large que possible, ces outils doivent pouvoir prendre en compte les données de divers systèmes informatiques si nécessaire. Idéalement, une initiative Lean peut également inclure la création d'un système visant à réunir toutes les données, c'est-à-dire un lac de données (data lake). Cela servirait de fondation à toute initiative visant à optimiser la supply chain. Par ailleurs, l'informatique peut également être restructurée de manière plus rationnelle, plus Lean.

De cette façon, il faut insister sur le fait que la Simplicité et la Facilité sont deux choses différentes. Le concept d'héritage existe en informatique comme il existe pour les vieilles habitues et les processus au sein d'une équipe. Il existe une quantité substantielle de complexité accidentelle concernant les systèmes informatiques dans les supply chains. Généralement, le comptage des unités n'est pas cohérent d'un bout à l'autre de la supply chain, les conventions de dénomination varient d'un système à l'autre avec une sémantique hétérogène. A titre d'exemple, les domaines qui incluent des dates sont généralement un cauchemar : au sein d'un même tableau, voire d'une même colonne, une date peut, d'une ligne à l'autre, correspondre à la date d'une commande ou celle d'un retour ... La solution facile, souvent mise en place dans les entreprises, consiste en une correction incrémentielle des bugs, l'ajout d'une colonne supplémentaire par-ci par-là, ou la réutilisation de colonnes existantes d'une façon différente (ce qui est probablement la raison pour laquelle les retours apparaissent dans la même colonne que les commandes). Afin de rendre les choses "lean", le système doit rester structurellement simple : un type d'événement correspond à un tableau, avec un nom approprié et explicite, idéalement documenté correctement quelque part quant au contenu dudit tableau. Cela signifie que, lorsqu'une supply chain évolue, le système informatique doit être revu en profondeur afin d'éviter tout héritage. Si nous en revenons aux trois types de gaspillage, des problèmes structurels du système informatique peuvent mener à de l'irrégularité (comme un manque de cohérence entre tel et tel tableau, ou au sein de systèmes), des tâches sans valeur ajoutée (comme des contournements effectués par le personnel pour compenser les problèmes), et même une surcharge (le personnel pouvant être surbooké par des tâches dites sans intérêt ou dont la productivité est drastiquement réduite). Lorsqu'il s'agit de supply chains modernes, l'informatique est - ou devrait être - au centre même de tout effort Lean.

La méthode Lokad concernant le Lean Management de la Supply Chain

La Supply Chain Quantitative de Lokad a de nombreux points communs avec la philosophie Lean. La réduction du gaspillage, en particulier à travers un meilleur contrôle des stocks, est sans aucun doute un objectif que nous partageons. Nous essayons également toujours de garder à l'esprit une vision holistique, basée sur les bons KPI. Pour Lokad, une Supply Chain Quantitative doit être menée de manière transversale, avec l'aide de coordinateurs de projet pour une compréhension approfondie du processus d'entreprise, lmais avec une évaluation quantitative réalisée à travers des analyses de données avancées.

"Muda" (les actions qui n'ont pas de valeur ajoutée) devrait donner lieu à une automatisation, et la livraison d'un système et à la mise en place d'un système destiné à soutenir les équipes chargées des achats, de la planification ou de la tarification, afin qu'elles puissent prendre des décisions plus rapidement et de manière plus efficace. En ce qui concerne les prévisions, cela implique aussi de prévoir directement au niveau le plus pertinent sur le plan commercial, et non avec des groupes conventionnels ou des précisions inutiles (comme la prévision au jour le jour si les commandes ne sont faites qu'une fois par mois), ou encore pour répondre à des stocks de régularisation (comme les stocks de sécurité) qui sont principalement des pratiques légales. "Mura" (l'irrégularité) doit être traitée en particulier à travers l'étude de données, avec une cartographie détaillée dès le début de toute mise en œuvre afin de fournir des bases solides à toute analyse ultérieure. Enfin, "Muri" (la surcharge) est intimement liée à l'automatisation et soutient les équipes par des scientifiques experts en termes de Supply Chain, afin de ne pas laisser aux équipes la gestion manuelle de catalogues de milliers, si ce n'est de centaines de milliers, de références. Cela implique aussi de s'assurer du bon contrôle du stock : les entrepôts ou magasins ne devant pas déborder de quantités excessives de produits.

A travers Envision, nous adoptons une approche flexible pour effectuer des analyses probabilistes de toutes les options disponibles, en évaluant leur impact financier et en offrant aux utilisateurs finaux la possibilité, à travers des tableaux de bord, des listes de priorités (listes de commandes, listes d'expédition, remises, ...) et des KPIs, d'automatiser certaines de leurs actions, d'effectuer des simulations et de réagir rapidement au marché.